PHASE PROPULSEE ARIANE 1

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L'étude concerne le lanceur français ARIANE 1. Ce lanceur parfaitement réussi, marque l'entrée en force de l'industrie spatiale française dans le marché des lanceurs.

Ce problème est l'occasion, outre l'aspect historique, d'étudier la phase propulsée de montée et quelques séquences de vol essentielles, notamment la trajectoire de la coiffe.

Le vol en question est nommé L6, sixième d'une longue série de réussites commerciales. Le lancement était double et nécessitait une adaptation particulière pour le premier satellite injecté.

PROBLEME

DONNEES NUMERIQUES :

mT = 39.86 104 km3s-2 constante de gravitation terrestre

Se = 2.81 m² : surface d'éjection des tuyères

S = 11.34 m² : surface de référence(maître couple) du lanceur, pour les calculs de traînée.

Atmosphère terrestre : altitude à prendre en km

0 < Z < 11 km : pa(Z) = 101337 Exp( - 0.127777*Z ), pression ambiante en Pa

11 < Z < 25 km : pa(Z) = 117720 Exp( - 0.148*Z ), pression ambiante en Pa

r(Z)=2.2*Exp( -0.1598*Z) masse volumique de l'air à l'altitude Z , r(Z) en kg/m3

DOCUMENTATION TECHNIQUE RETRANSCRITE :

Ces données numériques proviennent des documents destinés à la presse scientifique de l'époque, documents en provenance du CNES.

DOC 1 : Phase de décollage : latitude 5 °236, longitude -52°.775

Temps

( s )

Altitude Z

(km)

Vitesse ( m/s )

Pente (°)

VR

Acc(1)

( m/s² )

Relative VR

Absolue Va

3.4

-4

0

463.2

0

11.82

7

9

 

 

 

12.03

15

149

 

 

 

12.54

30

913

 

 

 

13

82(2)

12000

403.8

709.3

70°.1

18.32

(1) Il s'agit de l'accélération statique.

(2) t = 82 secondes correspond à une pression dynamique maximum. Rappelons que c'est passé d'un peu le mur du son, que cette pression est la plus grande et qu'elle vaut

DOC 2 : Documentation retranscrite :

Evénement

Temps

( s )

Altitude

Z (km)

Vitesse ( m/s )

Pente (°)

VR

Acc(1)

( m/s² )

VR

Va

Extinction L140

145.5

59.4

1684.4

2019.4

48.4

41.69

Séparation 1/2

150.5

65.7

1667.6

2008.2

47.4

0.4

Début vol guidé début moteur 2

160.6

77.9

1710.1

2060.8

45.3

15.2

Largage coiffe

254.0

112.9

3101.4

3559.2

16.2

30.83

Extinction L33

286.9

201.1

4265.4

4730.5

11.7

47.43

Séparation 2/3

291.9

205.4

4288.7

4754.6

11.3

1.0

Arrêt H8

854.4

200.7

9756.2

10230.2

0.6

20.1

Injection(3)

855.8

200.8

9766.2

10240.3

0.6

0.01

(3) Les coordonnées géographiques du point d'injection sont latitude lS = 0°.102 et Longitude LS = - 18°.865

DEVIS MASSIQUE DU VOL ECS1+AMSAT :

La charge utile comprend pour un lancement double: ECS1 --> 1043 kg, AMSAT ---> 155 kg, SYDA ---> 188 kg, ce qui donne au total 1386 kg.

NB : SYLDA : Système de Lancement Double d'Ariane.

Equipement concerné

Détail ( kg)

Cumul sans masse utile ( kg)

Case à équipements

H8 sec

Fluides résiduels

Ergols de queue de poussée du HM7

ARIANE FIN REGIME ETABLI DU HM7

277

1115

260

8

 

 

 

 

1660

Ergols non propulsifs H8 (éjectés)

Ergols utiles du H8

Ergols de montée en poussée du HM7

ARIANE A L'ALLUMAGE DU HM7

3

1885

18

 

 

 

9556

Masse H8 larguée à la séparation 2/3

Ergols de mise en froid du HM7

Fluides résiduels du L33

Ergols de queue de poussée du L33

ARIANE FIN DE REGIME ETABLI L33

464

1

566

3109

215

 

 

 

 

13921

Coiffe larguée

Ergols non propulsifs éjectés L33 et H8

Ergols utiles du L33

Ergols de montée en poussée du L33

ARIANE ALLUMAGE VIKING 5

842

74

33227

202

 

 

 

 

48266

Masse larguée séparation 1/2

Fluides résiduels du L140

L140 sec

Ergols queue de poussée L140

ARIANE FIN DE REGIME ETABLI L140

681

1161

13220

1065

 

 

 

 

64393

Ergols non propulsifs éjectés L140+H8

Ergols utiles du L140

ARIANE AU DECOLLAGE (SANS C.U) A t = 3.4 s

57

142458

 

 

 

206908

Ergols consommés sur table (sans C.U)

1500

208408

I PREMIERS INSTANTS DE VOL :

A t = 3.4 s :

Pourquoi la fusée ne décolle-t-elle pas à t=0 s?

Vérifier la valeur de la vitesse absolue.

A l'aide de l'accélération statique sol et du devis de masse , retrouver la poussée au sol du L140. Calculer alors la poussée dans le vide.

Entre t = 3.4 s et t = 15 s :

En adoptant une loi d'accélération linéaire entre ces 2 instants, retrouver l'altitude du lanceur à t = 25 secondes.

A t = 82 s :

Calculer la force de traînée sur le lanceur.

II LE VOL PRINCIPAL JUSQU'A L'INJECTION :

A t = 254 s :

La coiffe est larguée et nous sommes dans le ville tellement la pression dynamique est faible, ce qui justifie l'abandon de la coiffe destinée à protéger la charge utile d'un flux thermique important.

Vous calculerez l'apogée Za du mouvement képlérien de la coiffe.

Injection à t = 855.8 s :

Ces calculs sont l'occasion d'appliquer les principales notions du cours.

Préciser les éléments essentiels de la trajectoire képlérienne : a; e, apogée Za et périgée Zp.

Phase propulsée du H8 :

Calculer en utilisant les documents :

- La poussée du H8

- Son débit massique

- L'impulsion spécifique

- L'incrément de vitesse délivré par cet étage, expliquer le petit écart avec la variation réelle de vitesse relative.

III PERTES DE VITESSE SUR L'ETAGE 1 :

Utilisez l'ensemble des données pour évaluer les pertes de vitesse sur l'étage 1, avec naturellement l'approximation de l'impulsion spécifique moyenne.

IV Question subsidiaire :

Comment expliquez-vous l'accélération de 0.4 m/s² au moment de la séparation 1/2?

SOLUTION

I PREMIERS INSTANTS DE VOL :

A t = 3.4 s :

 La fusée ne décolle pas à t=0 s, car la montée en régime des moteurs Viking, n'est pas instantanée. Il faut attendre que le débit soit nominal et que les poussées des quatre moteurs soient quasiment identiques, ce qui est mesuré par des capteurs. Si on lâchait le lanceur avec une dissymétrie dans les poussées, le couple créé ferait tourner le lanceur autour de son centre d'inertie et il s'écraserait au sol.

NB 1 : Les ergols consommés sont dits consommés sur table de lancement.

NB 2 : En réalité les poussées ne peuvent être strictement identiques. Ce petit défaut est instantanément détecté par des gyromètres qui vont mesurer la rotation qui en résulte. Une chaîne d'asservissement commande alors un léger braquage des tuyères autour des axes de tangage ou de lacet, afin de compenser le couple parasite.

Vous observerez d'ailleurs, si l'occasion se présente, le travail de compensation des tuyères sous le lanceur, avant même le décollage. Tout simplement parce que le vent ou des vibrations agissent sur la tête du lanceur entraînant des rotations parasites, détectées et compensées virtuellement, puisque le lanceur est encore sur table

 La vitesse absolue ( c'est à dire dans un repère inertiel de centre terre, non entraîné dans la rotation terrestre), provient uniquement de la rotation de la terre.

 Notons FS, FV, la poussée au sol ou dans le vide, M(t) la masse à l'instant t, G l'accélération statique, qui est rappelons le l'accélération due aux forces autres que la gravitation.

La loi fondamentale donne, avec la masse prise au décollage :

La poussée dans le vide s'obtient par la relation générale :

Ces résultats sont tout à fait conformes à la fiche technique du lanceur.

Entre t = 3.4 s et t = 15 s :

La loi d'accélération est simple :

Une intégration supplémentaire conduit à l'altitude Z à t = 15 secondes :

A t = 82 s :

L'accélération statique G, la connaissance de r(Z) et de Z, masses et temps, donnent aisément la traînée..

Nous en déduisons le coefficient aérodynamique:

II LE VOL PRINCIPAL JUSQU'A L'INJECTION :

A t = 254 s :

Les données numériques nous fournissent tous les éléments de calcul d'une trajectoire képlérienne.

Avec VR = 3101.4 m/s, Vo = 3559.2 m/s, gR = 16°.2, il est possible de calculer la pente absolue go, en utilisant les relations de passage conditions relatives-absolues.

La troisième relation générale VR*singR = Vo*singo entraîne go = 14°.06

Avec les conditions initiales Vo, ro = RT + Zo , go on calcule les constantes E (énergie spécifique) et K (constante des aires, puis le demi grand axe a et l'excentricité e et enfin Za l'apogée sol atteint par la coiffe.

Injection à t = 855.8 s :

Calcul des éléments essentiels de la trajectoire képlérienne : a; e, apogée Za et périgée Zp.

Un calcul strictement analogue au précédent, pour la coiffe, donne à l'injection :

go = 0°.572, E = -8.16124 km²s-2, K = 6.7366 km²/s, a = 24422 km, e = 0.73065, Za= 35888 km, ra = 42266 km, Zp = 200 km.

Nous confirmons que le vol est de type GTO.

NB 1 : Un périgée à 200 km est une constante des injections par ARIANE.

NB 2 : L'apogée est un peu plus "haut" que le niveau géostationnaire, pour 2 raisons : la première pour préparer la dérive de mise à poste, la deuxième parce que les perturbations obligent à des conditions d'injection osculatrices un peu différentes.

NB 3 : On remarquera que le point d'injection est quasiment sur l'équateur, pour assurer un apogée quasiment sur l'équateur, ce qui permet une circularisation définitive en géostationnaire, sans problème.

Détails de la phase propulsée du H8 :

Avec l'accélération de 20.1 m/s² juste avant l'arrêt du H8, à plein régime établi et la masse on peut déduire la poussée du H8

A l'époque on parlait d'une poussée de 6 tonnes.

Pour le débit, le calcul est élémentaire :

L'impulsion spécifique Isp3 = F3/q =4336 m/s ou 442 s dans l'unité qui prévaut toujours.

Enfin l'incrément de vitesse DV3 se calcule par :

La lecture du tableau de marche du H8 donne à l'allumage une vitesse relative de 4288.7 m/s et à l'extinction de 9756.2 m/s. L'accroissement réel de vitesse est de 5468 m/s donc inférieur de 81 m/s au calcul théorique(1.5% d'écart ce qui est très peu).

La raison de l'écart est double : d'une part la non prise en compte de la montée en poussée et de la queue de poussée, d'autre part des pertes minimes par pilotage ( poussée non alignée sur la vitesse relative) et naturellement quelques petites approximations.

III PERTES DE VITESSE SUR L'ETAGE 1 :

Impulsion spécifique sol de l'étage 1 :

Impulsion spécifique dans le vide de l'étage 1 :

Un calcul analogue, fait au temps 145.5 s alors que s'éteint le moteur de l'étage 1 et qu'à Z = 59.4 km d'altitude le lanceur est dans le vide donne :

Impulsion spécifique moyenne de l'étage 1 :

Incrément délivré par l'étage 1 :

NB : la variation réelle de vitesse relative entre l'allumage et l'extinction des moteurs de l'étage 1 est de 1684.4 m/s, ce qui donne comme pertes sur cet étage, sensiblement 1274 m/s, pertes dues essentiellement à la pesanteur et à la traînée.

IV Question subsidiaire :

Cette accélération faible est créée sur l'étage 2 par des fusées d'accélération disposées sur cet étage. En effet si le lanceur dans cette phase balistique dans le vide n'était pas accéléré, il serait en état d'apesanteur et donc les ergols liquides "flotteraient" dans les réservoirs, au risque d'empêcher l'amorçage des turbopompes. Une petite accélération axiale est donc nécessaire sur un étage à ergols liquides pour "plaquer" ceux-ci au fond des réservoirs.

Naturellement un tel dispositif n'est pas nécessaire sur l'étage 1 où la pesanteur suffit ni sur des moteurs à poudre.

GUIZIOU Robert juillet 2000